Dans la peau d’une testeuse de voitures

Le monde automobile est dominé par la gent masculine mais il y a aussi des femmes qui baignent dans ce milieu et qui en ont même fait leur métier! J’ai interviewé l’une d’entre elles, Anne-Charlotte Laugier du blog Charlotte au volant qui nous fait découvrir le métier de journaliste et blogueuse auto.

– Peux-tu te présenter en quelques mots pour mes lecteurs qui ne te connaissent pas?
Je suis une maman de 38 ans, provinciale depuis 3 ans, plutôt normale dans l’ensemble. Sauf que je suis un peu « hybride »… Et oui, j’ai deux casquettes : je suis à la fois journaliste (dans la culture, le tourisme et l’automobile) et blogueuse automobile. L’approche est très différente et c’est ça qui m’amuse énormément.

– Comment es-tu tombée dans la marmite de l’automobile?
J’interviewais tranquillement des artistes, lorsque l’on m’a demandé de chapeauter le premier site sur les femmes et les voitures : Eve Auto (racheté par la suite par Turbo). J’ai tout de suite trouvé l’univers automobile intéressant parce que sans fond. On aborde absolument tous les sujets à travers les quatre roues : l’économie, la politique, la mode, la sécurité, l’écologie, les innovations… et on parle aussi (et pas encore assez) des femmes. Et ça tombe bien, j’en suis une. Le challenge est encore plus important pour moi.

– Quand as-tu créé ton propre blog?
Après ma première expérience dans un panier de crabe composé essentiellement de mâles qui ne comprenaient absolument pas pourquoi une femme testerait à leur place les voitures, j’ai décidé de créer mes propres blogs : CharlotteAuVolant et LesEnjoliveuses avec Clémence de Bernis. Depuis un an, je concentre toute mon attention sur CharlotteAuVolant.net parce que c’est mon laboratoire, ma passion. Je ne me définis pas comme une vraie blogueuse car je reste profondément une journaliste. En disant « je », en étant subjective sur mon blog, je suis aux antipodes de ce que j’ai appris. Mais l’exercice me plaît et me demande beaucoup d’audace : si le post ne plaît pas, je ne peux pas me cacher derrière mon petit doigt. De plus, j’ai vraiment envie de tenter de nouvelles choses. Dans l’automobile, le ton est encore très conservateur. Je veux me dégager de cela en proposant une vision amusante et décalée. Je cherche surtout à apporter de la féminité, des images avec des filles au volant, des vidéos que j’ai baptisé « auto-dérision » car nous sommes aujourd’hui décomplexées en voiture. Bien sûr, je m’adresse autant aux hommes qu’aux femmes. Mais mon combat est vraiment de faire exister la sensibilité propre aux filles. La route est encore longue. Il faut continuer.

– Comment se passe le test d’une nouvelle voiture? Ce sont les marques qui t’invitent à essayer leurs derniers modèles?
Ce sont les constructeurs qui m’invitent à essayer leurs nouveaux modèles. Tout simplement parce que cela fait 8 ans déjà que j’écris sur leurs nouvelles voitures dans différents médias à grande diffusion. Mon blog est également souvent invité car il est bien référencé et offre un ton totalement différent. Mais grâce à ma carte de presse, je peux tout à fait essayer les autos en parc presse et en profiter pour les tester avec mes trois enfants à bord. Les constructeurs et les lecteurs aiment voir comment une voiture se vit au quotidien.

– A quoi ressemble une journée typique d’une testeuse de voitures?
Il faut se lever tôt (souvent 5h du mat) pour décoller tôt d’Orly ou Roissy. Le plus souvent, les essais ont lieu en Espagne (destination très prisée), au Portugal, au Maroc (l’essai du Macan avec Porsche par exemple), en Scandinavie, plus rarement en Islande et aux Etats-Unis. Les constructeurs veulent nous proposer de jolis lieux pour que les télés ou les blogs réalisent de belles images. En deux jours, nous parcourront minimum 300 km en mixant petites routes et autoroutes. On nous nourrit et on nous offre un toit souvent splendide dans de splendides hôtels. Mais entre les conférences de presse et l’écriture, nous n’avons guère le temps d’en profiter. J’entends souvent les gens nous envier : « C’est le rêve ton métier ». C’est vrai, car nous sommes libres et nous avons la chance inouïe de parcourir le monde. Mais cela ne suffit pas de se laisser porter : ensuite il faut écrire, trouver un angle, savoir partager l’essentiel d’un modèle.

– Quels sont pour toi les éléments importants à regarder lorsque l’on teste une voiture?
Tout d’abord, je tiens à dire que je ne teste pas une auto comme un pilote automobile. Normal, je ne suis pas pilote automobile ! Pour ma part, je me glisse dans la peau d’une consommatrice et je décèle ce qui me plaît ou déplaît. Bien sûr, j’évalue la puissance délivrée par la voiture, je vois si elle tient le pavé ou pas, mais je propose des compte-rendu émotionnels en racontant une histoire. Ceux et celles qui me lisent ne viennent pas sur mon blog pour manger du technique. D’excellents supports le font déjà. J’essaie plutôt de donner envie à un public non averti, qui pourrait même être allergique à l’automobile. Cependant, je donne aussi de vraies infos. Je ne perds pas complètement de vue l’aspect journaliste….

– Quel est ton meilleur souvenir d’essai voiture?
Une journée incroyable sur le circuit de la Ferté-Gaucher. Nous n’étions qu’une petite dizaine à être invités par Mazda et nous avons roulés comme des fous en MX5 préparée. J’avais même un coach qui m’a appris à piloter.

– Et ton pire?
Le pire aurait pu être celui où nous avons été obligés de faire du stop pour rallier notre hôtel. Mais la baroudeuse que je suis en garde finalement un excellent souvenir. Globalement, les constructeurs automobiles bordent sacrément bien leurs opérations et nous gâtent énormément.

– Quels conseils donnerais-tu à une personne qui voudrait devenir « testeur de voitures »? C’est un métier rêvé quand on est passionné d’automobile!
Pour tester une voiture, il suffit de prendre la sienne ou celle de son voisin. De prendre des photos et d’écrire. Puis de l’intégrer à son blog. Dans ce sens, tout le monde peut être testeur auto. Simplement, s’il veut devenir pro et être invité par les constructeurs pour en faire son métier, c’est une autre histoire. Il faut acquérir une certaine légitimité, publier tous les jours, posséder une communauté (les réseaux sociaux sont très importants), avoir beaucoup de lecteurs. Finalement, l’écriture est au centre de tout. Sans elle, rien ne se passe. Idem pour la vidéo qui nécessite forcément une base… écrite. Je crois qu’un passionné peut tout à fait ouvrir son blog mais que dès qu’il voudra gagner sa vie avec ou être apparenté à un pro, il s’exposera à de grosses déceptions. Tout métier a ses contraintes et dans l’automobile, elles sont particulièrement lourdes et complexes.

– Fais-tu l’entretien basique de ta voiture?
Je ne suis pas la meilleure mecagirl du monde ! Je me contente vraiment du lavage, de la pression des pneus (ça m’obsède) et de l’huile. Pour les opérations plus importantes, j’appelle un copain ou je passe chez un garagiste. La mécanique et moi, ça fait pas bon ménage.

– Quelle est la voiture de tes rêves?
Je crois que je l’ai. Une Audi A8, 4.2l, 350ch. C’est la voiture de mes rêves, du moins au quotidien.

– As-tu des projets à venir?
Je planche sur un livre « Le dico décomplexée des filles au volant » que je viens de présenter à différents éditeurs.

Merci à Anne-Charlotte de m’avoir accordé cet interview!

Anne "Mecagirl"

Je préfère avoir les mains sous le capot plutôt qu'au fourneau. Je m'amuse à jouer avec les stéréotypes et à détourner les clichés.
Ma titine, je l'aime et je suis fière de prendre soin d'elle.