Cela n’aura échappé à personne que les prix des carburants en station-service connaissent des records ces dernières semaines. En attendant de vivre au Venezuela, dans le pays possédant les plus grandes réserves pétrolières prouvées du monde où le prix d’un litre d’essence est quasi gratuit, les automobilistes sont tentés de se diriger vers les biocarburants. Le super éthanol E85 affiché à la pompe autour de 0.65€/L séduit de plus en plus, leurs ventes ont d’ailleurs bondi de plus de 40% ces derniers mois. Faut-il cependant céder aux sirènes du biocarburant ? Quels sont les avantages et inconvénients de ce type de carburant ? Est-il vraiment plus écologique ?
Que signifie le terme biocarburant ?
Un biocarburant ou agrocarburant est un carburant issu de la biomasse, c’est-à-dire obtenu à partir d’une matière première végétale, animale ou de déchets. Il existe 3 générations de biocarburant qui constituent des énergies non fossiles, renouvelables et dont le but premier est de répondre à l’épuisement des ressources fossiles.
Biocarburant de 1e génération
Il est produit à partir de cultures traditionnellement destinés à l’alimentation comme le blé, la betterave, le soja, le tournesol… etc
Le biocarburant de 1e génération permet de fabriquer :
- Du bioéthanol : Provenant de la culture de maïs, de la canne à sucre, de la betterave à sucre, du blé et par un procédé de fermentation chimique, il est utilisé dans les moteurs essence.
- Du biodiesel : Via la transestérification qui est un procédé dans lequel les huiles de colza, blé, tournesol, palme sont mélangées à froid à un alcool (éthanol ou méthanol) en présence d’un catalyseur (hydroxyde de sodium ou de potassium).
Biocarburant de première génération (©DR, d’après source IFP)
Qualités environnementale mises en avant : réduction des CO2 grâce à la photosynthèse. Énergie plus propre et renouvelable en replantant des semences.
Inconvénients : Production de biocarburant possible soit sur des terres disponibles qui sont en concurrence directe avec l’alimentation humaine ou animale soit sur de nouvelles terres comme des forêts. De nombreuses forêts entières ont été décimées pour être remplacé par des champs de palmiers à huile. Couper des arbres, les bruler, faire un labourage des terres sont des activités qui dégagent plus de CO2 que les extractions des énergies fossiles.
Pour pallier à ces désagréments environnementaux, des scientifiques ont développé un biocarburant dit de 2e génération. Cependant, aujourd’hui, seule cette 1e génération de biocarburant est produite à l’échelle industrielle.
Biocarburant de 2e génération
Ce carburant a comme source des plantes linio cellulosique : roseaux, copeaux de bois, buissons non utiles aux terres agricoles qui se plantent sur des terres pauvres ou inondables qui ne sont pas exploitables pour la chaîne alimentaire.
Il existe deux principales méthodes de production des biocarburants de seconde génération :
- par voie thermochimique ou gazéification
- par voie biochimique
Ces végétaux poussent sans engrais mais le processus pour extraire de l’éthanol de ces tiges et feuilles naturellement dures est plus long et plus complexe que celui de la betterave ou du blé. Cela demande plus de temps et donc plus d’énergie.
Biocarburant de 3e génération
Les biocarburants de troisième génération ne sont encore qu’au stade de la recherche et de projets pilotes.
On cultive des algues vivantes invisibles à l’œil nu, une vingtaine d’espèces d’algues dont certaines peuvent contenir plus de 50% de leur masse en lipides, pour en extraire de l’huile pour fabriquer de l’algocarburant. Comme le colza, les algues microscopiques produisent des lipides qui mélangés avec du solvant permettent de faire du biodiesel avec un rendement beaucoup plus important que les plants terrestres. Les algues peuvent baigner dans de l’eau non potable, salée ou même usée. De plus, elles se nourrissent de CO2. Il coûte entre 3 et 10€ le litre. D’autres études sont menées sur des algues Chlamydomonas reinhardtii car lorsqu’elles sont privées de souffre, le processus de photosynthèse diminue et elles mettent en place une autre voie énergétique : la production d’hydrogène.
Le principal avantage est que ces algues peuvent se développer dans de l’eau salée, usée sous des serres et n’ont pas besoin de biocombustibles afin d’être récoltées.
Le frein actuel reste le procédé d’extraction qui représente un coût encore trop élevé pour une utilisation à grande échelle.
Comment les biocarburants sont distribués en stations-service ?
Les biocarburants sont essentiellement utilisés en mélange avec les carburants d’origine fossile et disponible dans les stations-service sous les noms :
- E5 (anciennement SP95 et SP98) qui contiennent jusqu’à 5 % en volume d’éthanol
- E10 (anciennement appelé SP95-E10) qui contient contient jusqu’à 10 % en volume d’éthanol
- le gazole contient jusqu’à 8 % en volume d’EMAG (esters méthyliques d’acide gras), plus communément appelé « biodiesel ». Il existe un carburant nommé B30, dans lequel se trouvent 30% d’EMAG, mais il n’est pas commercialisé dans les stations-service car incompatible avec l’immense majorité des véhicules diesel de particuliers en circulation.
- le superéthanol E85 contient entre 65 % et 85 % en volume d’éthanol
Finalement, nous roulons tous en biocarburant ! Le E10 et le E85 sont les carburants les moins chers en station-service. Tous les véhicules immatriculés depuis 2000 peuvent rouler en E10. Le superéthanol E85 est un carburant contenant jusqu’à 85% d’éthanol et 15% d’essence en volume destiné aux véhicules flex fuel. Une teneur minimale en essence est nécessaire pour garantir le fonctionnement à froid du véhicule. Si vous souhaitez faire rouler votre voiture à l’E85, c’est possible à condition de vous procurer un boitier électrique maintenant homologué. Selon le site bioethanolcarburant, un boitier E85 homologué, vous coutera de l’ordre de 700€ T.T.C. pour un moteur 4 cylindres injection indirecte (installation et assurance comprise).
Attention cependant, si vous ne roulez qu’en E10 ou E85, sachez que l’éthanol est bien plus corrosif que l’essence et que cela a un impact à long-terme sur la durée de vie de certaines pièces moteurs : durites, soupapes, système d’injection… Je vous ferai un article spécifique sur l’E85 très prochainement ;)
Selon le ministère de la transition écologique et solidaire : « La France est un des pays européens où les biocarburants sont les plus développés. La France est le quatrième pays producteur mondial de biocarburants (5 % de la production mondiale) après les États Unis, le Brésil et l’Allemagne, avec plus de 2 millions de tonnes de biocarburants produits sur le territoire. La consommation française de biocarburants correspond à moins de 5% de la production agricole française de céréales, d’oléagineux et de plantes sucrières. Elle est très majoritairement issue de productions agricoles nationales, environ 90% pour le bioéthanol et l’ETBE et 50% pour le biodiesel. »
Et vous, que pensez-vous des biocarburants ?